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Jacques Gamblin, président malgré lui

À quelques jours de la sortie en salle du film Le Tigre et le président, tourné en Pays de la Loire, retour sur la rencontre avec Jacques Gamblin, qui incarne Paul Deschanel, tenant en échec en 1920 le favori du scrutin, Georges Clemenceau, joué par André Dussolier. Un Jacques Gamblin sensible, investi, viscéralement amoureux du métier. Morceaux choisis.

PAUL DESCHANEL RESTE COMME L’UN DES CHEFS D’ÉTAT FRANÇAIS DONT LE MANDAT À L’ÉLYSÉE AURA ÉTÉ L’UN DES PLUS BREFS. QU’EST-CE QUI VOUS A SÉDUIT DANS CE PERSONNAGE ?

Jacques Gamblin : (Rires). C’est vrai que c’est assez drôle. Sept mois, il est resté président sept mois. Les férus d’histoire se souviennent de cet itinéraire presque anecdotique : en mai 1920, lors d’un de ses voyages en train, Paul Deschanel souhaite prendre l’air à la fenêtre et se retrouve en pyjama sur la voie. Jean-Marc Peyrefitte - le réalisateur- s’est demandé si on pouvait résumer cette trajectoire politique à cette chute, et le film entend réparer cette absence. C’est cette démarche qui m’a séduit en particulier.

ON SENT UN ENTHOUSIASME TOUT PARTICULIER D’AVOIR INTERPRÉTÉ CET HOMME D’ÉTAT…

J. G. : Je vais être franc : j’ai adoré me fondre dans ce personnage politique haut en couleurs, que l’on connaît mal. Il fallait l’inventer car je ne disposais pas non plus d’un matériel historique important pour me guider dans mon travail d’acteur. Il a fallu s’imprégner du contexte politique des Années folles et des discours lyriques de cet humaniste visionnaire, pour faire revivre l’homme politique. La liberté que m’a laissée Jean-Marc Peyrefitte fait que le tournage a été un moment merveilleux.

Diriez-vous que vous avez des points communs avec Paul Deschanel ?

J. G. : Cet homme a été considéré comme un dingue, je l’ai trouvé en réalité fabuleux. Dans la variété de ses humeurs, dans ses couleurs… Ce rôle m’a rendu heureux car il est profondément humain, au sens où il met en valeur tout ce que j’aime chez un homme : sa poésie, sa franchise. Je ne sais pas si je suis drôle, mais la singularité du personnage me touche. J’adore quand les genres se mélangent, et les grands écarts entre drôlerie et émotions. Cela me ressemble, oui.

Comment vous êtes-vous préparé à jouer ce rôle ?

J. G. : Au moment même où j’ai lu le scénario, la chose a évolué en moi, dans une forme de maturation inconsciente. J’ai bien entendu mené un travail de recherche car je souhaitais démarrer dès les premières scènes avec beaucoup de précisions, afin d’être le moins fragile possible dans mon rôle. J’aime maîtriser l’ensemble de l’œuvre, cela me rend plus léger au moment du tournage, même si je me suis toujours senti libre avec ma mémoire. Il m’arrive de réinventer les choses en fonction du décor, du climat, des sensations sur le plateau.
 

À chaque rôle j'apprends sur moi-même.

Le film est aussi l’histoire d’un duel avec un homme qui a compté pour la France, pour la Vendée notamment…

J. G. : C’est vrai que Georges Clemenceau impose le respect. Le fait que le rôle ait été proposé à André Dussolier n’est pas innocent. Et il n’a pas été simple de trouver le ton juste de notre rivalité. Clemenceau avait tout le tempérament de sa région natale, à la fois volontaire et persévérant. J’étais beaucoup dans l’exploration d’un personnage plus secret.

Que retenez-vous de cette expérience cinématographique singulière ?

J. G. : Déjà, en tant que Normand, j’ai été très sensible aux espaces de tournage en Pays de la Loire, ils m’énergisent et ont donné un vrai sens esthétique au film. L’émotion est juste. Et à chaque rôle, j’apprends sur moi-même. Le ton, l’attitude, la gestuelle. Ce qui est intéressant, c’est de chercher, ce n’est pas de trouver. Chercher c’est excitant, et l’imaginaire a tous les pouvoirs. Le métier de comédien m’incite à m’interroger finalement sans cesse sur l’être humain. C’est pour moi le paysage le plus passionnant : Deschanel résume bien la complexité de l’être humain, ses contrastes, ses paradoxes. J’aime apprendre de ces personnages.

Un mot sur la région des Pays de la Loire qui a offert plusieurs lieux de tournage…

J. G. : C’est une région que je connaissais peu et pourtant, j’ai quelques souvenirs très précis de mes passages ici. Il y eut Nantes à plusieurs reprises, Angers bien sûr dont le théâtre Le Quai m’avait réservé un accueil fantastique pour un de mes spectacles il y a quelques années. J’ai un autre souvenir, c’est le festival de théâtre de Noirmoutier : dans la Cour du château de Noirmoutier-en-l’Île, fabuleux endroit entre terre et mer. Et la mer, c'est l'endroit où je me sens le mieux, je me sens presque mieux sur l'eau que sur un plateau de théâtre (rires). Je ne sais pas si c'est la sensation d'être flottant, d'être nulle part, mais c’est un mouvement permanent, la mer. Et cette région est bordée par l’océan, n’est-ce pas ?

« J’ai été très sensible aux espaces de tournage en Pays de la Loire, ils m’énergisent et ont donné un vrai sens esthétique au film. »

La mer, la terre : êtes-vous toujours aussi sensible au monde qui vous entoure ?

J. G. : Je suis à la fois extrêmement conscient et lucide de la tragédie climatique que nous vivons et évidemment j’aimerais que toutes les décisions qui pourront être prises le seront pour le mieux-être de notre planète. Mais je ne suis pas un porte-voix, je suis un militant dans ma propre vie. L’état catastrophique de notre terre me désole, et ce sont des colères profondes que je soigne chaque matin en me levant. Nous sommes arrivés à un tel point qu’il n’y a plus le choix. Le bouleversement de nos vies est là, on ne peut pas dire ça n’existe pas.

Vous êtes un homme de cinéma, de littérature, de théâtre, de mise en scène …Y a-t-il des choses que vous n’avez pas encore explorées ?

J. G. : C’est vrai que je suis quelqu’un qui affectionne les aventures artistiques variées. J’ai aussi trouvé dans l’écriture une liberté totale, absolue. Avoir démarré ce travail d’auteur depuis des années et écrire des spectacles provoque chez moi des surprises, j’arrive en fait à me suspendre moi-même… Je ne sais pas ce qu’il me reste à découvrir, mais je nage constamment dans l’humilité, car je suis toujours à la recherche de quelque chose. Je ne suis pas là par effraction mais parce que j’ai vraiment choisi ce métier, avec mes tripes.

Racontez-nous ce choix de devenir acteur…

J. G. : Rien n’était écrit d’avance. Regardez, mes parents étaient commerçants, moi je devais être menuisier et je suivais une formation pour le devenir. C’est lors d’un court stage de théâtre en été, à 17 ans, pour devenir moniteur de colonie de vacances, que j’ai rencontré Hubert Lenoir, directeur du Théâtre du Totem installé à Saint-Brieuc. Devant ma curiosité, il m’a proposé de me former et d'entrer dans la compagnie comme technicien. Deux ans plus tard, je suis passé de l'autre côté de la rampe en devenant comédien. Je crois aux vertus de la formation, comme à la bonne étoile qui peut veiller sur chacun d’entre nous. La mienne brille beaucoup je trouve.

Retrouvez le film dans les cinémas des Pays de la Loire suivants :

Loire-Atlantique

  • Ciné Pôle Sud - Basse-Goulaine
  • Gaumont - Nantes
  • Pathé Nantes Atlantis - Nantes Saint-Herblain
  • UGC Ciné Cité Atlantis - Saint-Herblain
  • Ciné Presqu'Ile- Guérande
  • Atlantic - La Turballe
  • La Pax - Le Pouliguen
  • Cinéville - Saint-Nazaire 
  • Le Connétable - Clisson 
  • Le Gen'Eric - Héric 
  • Le Hublot - Le Croisic 
  • Cinéjade - Saint-Brévin-les-Pins 
  • Ciné NOVA - Savenay
  • Le Cep - Vallet

Maine-et-Loire

  • Les 400 coups- Angers 
  • Pathé - Angers 
  • Cinéville - Les-ponts-de-Cé 
  • Cholet CGR- Cholet 
  • Cinéma le Grand Palace - Saumur rive droite 

Mayenne

  • Cinéville - Laval
  • Le Vox - Mayenne

Sarthe

  • Pathé Quinconces - Le Mans 
  • CGR Saint-Saturnin - Saint-Saturnin
  • Le Palace - La Ferté-Bernard
  • Le Kid - La Flèche
  • Rex - Mamers
  • Confluences Sablé sur Sarthe - Sablé-sur-Sarthe

Vendée

  • Le Renaissance - Fontenay-le-Comte
  • Cinéville - La Roche-sur-Yon
  • Cinetriskell - Challans 
  • Ciné Islais - Ile d'Yeu
  • Agnès Varda - La Tranche-sur-Mer 
  • Le Grand Lux - Les Herbiers 
  • Le Grand Palace - Les Sables d'Olonne 
  • CinéTriskell - Luçon 
  • Le Mimosa - Noirmoutier
  • Cinémarine - Saint-Gilles-Croix-de-Vie

 

Jacques Gamblin

est acteur et auteur de théâtre. Il a été très tôt révélé sur grand écran avec les films Il y a des jours et des lunes et Tout ça pour ça, sous la direction de Claude Lelouch, avant de s’imposer avec Pédale douce de Gabriel Aghion (1995), puis avec Le Premier jour du reste de ta vie de Rémi Bezançon (2009) ou encore Le nom des gens de Michel Leclerc (2011). En 2019, il incarne avec force et émotion le rôle-titre de Joseph Ferdinand Cheval, homme rêveur et passionné.